Description
Dans le débat qui secoue la chrétienté, le problème du juste rapport entre Eglise et politique représente certainement un point chaud. L'Evangile est-il servi, ou au contraire trahi, quand ceux qui l'annoncent essayent d'en projeter la lumière sur tous les terrains où se joue l'existence collective des hommes ? Est-ce commettre un contre-sens spirituel que d'affirmer certaines positions militantes, certains choix précis dans un domaine si constamment livré au choc des passions adverses, à la fragilité du relatif et du provisoire?
Le présent ouvrage – où l'on trouvera tout sauf une « politisation de l'Evangile » – s'inscrit résolument sur la ligne d'un témoignage orienté vers le monde et ses combats. Son titre à lui seul aimerait exprimer l'étroite relation qui, selon l'Ecriture elle-même, unit deux réalités jumelées et pourtant distinctes : le Royaume de Dieu, d'une part, aboutissement final du fleuve de vie et de sainteté qui prend sa source dans l'œuvre de Jésus-Christ ; la cité terrestre, d'autre part, qu'il appartient au génie humain de construire afin d'y réaliser ce minimum (ou ce maximum, bien plutôt) de justice grâce auquel chacun, librement, puisse répondre à sa vocation malgré l'assaut des forces mauvaises.
Une double conviction traverse les pages qu'on va lire. La première est qu'en laissant l'esprit du monde envahir son culte et sa prédication l'Eglise abandonnerait sa raison d'être : elle renierait la dimension surnaturelle de son héritage. La seconde est qu'au nom même de la pureté du message évangélique, la vraie fidélité consiste à traduire ce message dans l'actualité des événements qui nous cernent : partout où il y va du bonheur des hommes, de leur avenir et de leur dignité profonde. Qu'est-ce à dire, sinon qu'au nombre des pires dangers qui menacent l'Eglise, il n'y a pas seulement les hérésies et les modes idéologiques? Le péril est aussi dans un certain biblicisme étriqué, il est aussi dans la peur de se compromettre et la paralysie due aux conformismes de l'ordre établi.