Aucune société ne va sans un jeu de la croyance. Ce jeu marque mon rapport à l’autre, touche mon identité, mes représentations, mon être dans le monde. Tout savoir et tout faire s’y définissent. L’expression de la croyance n’est pas toujours explicitement religieuse. La croyance peut être avouée, lieu d’échanges, tout à la fois objet de régulation et source d’affirmation personnelle. Elle peut aussi être refoulée, trouver ses revanches secrètes comme ses métamorphoses: elle affecte alors les réalités dites séculières et profanes, comme l’atteste aujourd’hui la vie sociale, en proie à toutes sortes de phénomènes idéologiques.
Le régime chrétien propose un jeu complexe de la croyance. Le sujet humain peut s’y déployer: ordonné à un champ symbolique fait de textes, de paroles, d’institution, et toujours provoqué à en contester les confiscations idéologiques. Le régime chrétien apparaît ici exemplaire, illustration institutionnelle concrète de la croyance – une parmi d’autres – et tout à la fois témoin de ce qui résiste à cette détermination et s’en vient la déborder.
C’est aux moments structurants de ce régime chrétien qu’est principalement consacré le présent ouvrage: une tradition comme lieu d’instauration et de rupture, une écriture polyphonique et singulière, un canon clos et fait de renvois, un dogme, marque d’historicité et proposition régulative. En final, on esquisse ici en quoi le régime chrétien est inscrit au corps, lieu de naissance du sujet humain et origine des méditations christologiques et trinitaires de l’Eglise.
